[Fouilles paléontologiques du site fossilifère de Cerin...

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localisation Bibliothèque municipale de Lyon / P0741 FIGRPT2454 04
technique 1 photographie positive : tirage noir et blanc ; 24 x 18 cm (épr.)
historique L'Ain à l'époque des tortues géantes et des dinosaures. Depuis 1975, une équipe de scientifiques se retrouve, chaque été, pour découper des tranches de terre. A Cerin, près de Belley. Et recomposer le temps perdu.
historique Une lagune bordée d'un côté par la terre et fermée de l'autre par une barrière de corail corail, qui assure le calme des eaux et la prolifération des poissons, oursins, tortues et autres espèces végétales et animales. Cet endroit protégé ne se trouve pas dans un coin perdu du Pacifique, mais représente ce à quoi pouvait ressembler une partie de l'Ain, il y a cent quarante millions d'années. Aujourd'hui, l'eau s'est retirée, les animaux se sont fossilisés et la lagune a pris l'aspect d'une carrière de calcaire que l'on peut observer à Cerin, près de Belley. C'est dans celle-ci, que depuis 1975, tous les étés, une équipe de scientifiques originaires de différentes universités françaises et européennes et de bénévoles - en majorité des étudiants en paléontologie - conduit des fouilles. Fouilles, dont l'ambition est de "reconstituer l'histoire de la lagune", comme le souligne Eric Buffetaut, directeur de recherches au CNRS et spécialiste des reptiles. Projet de longue haleine dont les origines apparaissent avec les premières exploitations économiques de cette carrière au siècle dernier. Le calcaire dégagé, lisse et de très bonne qualité, en plus de pierre à bâtir et carrelage, servait à l'imprimerie, pour la lithographie. Pourtant, à cette époque, on trouve déjà des fossiles, notamment des poissons et des lézards. Mais rien n'est alors entrepris pour mettre scientifiquement en valeur ces découvertes. Ce n'est qu'un siècle plus tard, que l'interrogation sur l'origine des mille cing cents poissons relance les fouilles de Cerin. En 1975, ce chantier, "unique en Europe par ses méthodes de fouille systématiques", s'ouvre sur la volonté de "trouver les couches à poissons et l'environnement dans lequel ils évoluaient", explique Jean-Claude Renaud, responsable technique. Mais au fil des ans, d'autres objectifs mobilisent les chercheurs. La découverte déterminante fut la mise à jour d'empreintes d'animaux. Qui permit d'émettre de nouvelles hypothèses sur l'histoire de la lagune. "Le recouvrement par la mer était changeant, le fond de la lagune a donc pu se trouver à l'air libre" et servir de terrain de jeux aux dinosaures, lézards et autres crocodiles. En compagnie de reptiles volants, dont la taille pouvait aller de celle d'un moineau à celle d'un aigle. Dans les eaux plus ou moins profondes, s'ébattaient requins et tortues. En plus de ces animaux fossilisés - ou de leurs empreintes - ont été trouvés des végétaux, des traces de rides faites par les mouvements de l'eau. L'ambition des chercheurs n'est donc pas seulement de "ramasser des spécimens", mais tous ces éléments rassemblés, puis analysés devraient permettre de "reconstituer l'histoire des êtres vivants dans cette région, leur environnement. C'est-à-dire pouvoir redéfinir l'écosystème d'alors". Lors des premières études, il y a une centaine d'années "les paléontologues attendaient que les carriers trouvent des spécimens et leur les vendent. Ils avaient donc une vue très partielle de l'environnement". Aujourd'hui les méthodes ont totalement changé et tout est rigueur et précision. "On retire les différentes couches tranche à tranche comme on effeuille un livre et on étudie chacune d'elles". Certaines ne révèlent rien, alors que d'autres auront conservé de nombreux empreintes et fossiles. Ces couches, dont l'épaisseur varie de cinq millimètres à vingt-sept centimètres, sont dégagées à la main, à l'aide de burins, au rythme d'une vingtaine tous les étés. A chacune de ces couches correspond un relevé cartographique qui indique l'emplacement des différents fossiles, empreintes ou traces découvertes. Ils sont photographiées, puis éventuellement moulées selon leur intérêt. En effet, "il est impossible de déplacer des dalles supérieures à un mètre carré, compte tenu de la fragilité du calcaire. Quant aux pièces exceptionnelles, elles sont découpées à la scie au diamant et expédiées à l'Université Claude-Bernard de Lyon pour être étudiées. Dès lors, "pour garder une image globale de l'ensemble il faut conserver des traces écrites ou photographiques". Commencées il y a quinze ans en haut de la carrière, les fouilles sont cette année vingt mètres en dessous. Environ trois cents couches ont été mises à jour jusqu'à aujourd'hui. "Les couches du haut il n'y avait pas grand chose" mais de toute façon, "il est possible d'avoir une couche riche et celle d'en dessous n'aura rien. On ne sait pas expliquer pourquoi". Seule certitude, la date approximative de formation de cet ensemble de pierre calcaire : il y a cent quarante millions d'années. En ce qui concerne le temps de formation de l'ensemble "il n'est pas possible, pour l'instant, de connaître la durée du cycle de formation calcaire". Une nouvelle couche formée tous les ans ou une tous les mille ans, toutes les hypothèses sont permises. Pour résoudre ces nouvelles énigmes, "les fouilles peuvent encore durer quatre, cinq ans, tout dépendra de l'intérêt scientifique et des moyens financiers". Pour l'instant, ce chantier de fouilles bénéficie du soutien financier du Conseil général de l'Ain, du CNRS et des villes de Lyon et de Genève. Ces aides permettent de payer le personnel scientifique et technique ainsi que de faire fonctionner la grue et le bulldozer. Mais, c'est avant tout, la passion et la patience d'un groupe de chercheurs et d'étudiants qui permet chaque été, de faire revivre pendant quelques semaines l'Ain au temps des tortues géantes et des dinosaures. Source : "Sous le calcaire, les fossiles" / Stéphanie Lucien-Brun in Lyon Figaro, 29 août 1989, p.24.
note à l'exemplaire Négatif(s) sous la cote : FIGRP00485.
note bibliographique Musée paléoécologique de Cerin-Marchamp. [En ligne] : https://www.museedecerin.com/ (consulté le 20-11-2023).

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